Point sur les relations commerciales entre EAU/Iran et Qatar/Iran

Le commerce de l’Iran avec les EAU et le Qatar : état des lieux

Les Émirats Arabes Unis (EAU) sont un partenaire commercial central pour l’Iran. D’après l’Iran Trade Promotion Organization (ITPO), les EAU représentaient, pour les échanges de biens non pétroliers, au premier semestre 2018, le troisième marché de l’Iran à l’exportationLes exportations non pétrolières de l’Iran vers les EAU représentaient en 2017, 14,4 % de l’ensemble des exportations non pétrolières (Source : ITPO). Évidemment, si l’on inclut les exportations pétrolières qui représentent près de 70 % des exportations de l’Iran, les exportations iraniennes à destination des EAU représentent une plus faible part des ventes iraniennes à l’export (près de 6 % en 2017).et disposaient également de la deuxième part de marché en Iran (cf. Tableau 1). À l’opposé, le Qatar était jusqu’à présent un partenaire commercial de moindre importance pour l’Iran, puisque ce pays ne représentait que le 19ème marché de l’Iran à l’exportation pour les produits non pétroliers durant le premier semestre 2018. Durant la même période, le Qatar disposait de la 70ème part de marché en Iran. Parallèlement, le commerce extérieur des EAU est beaucoup moins dépendant de l’Iran que l’inverse. En 2017, les importations en provenance de l’Iran ne représentaient que 0,7 % des importations totales des EAU alors que ses exportations vers l’Iran étaient proches de 4,9 % des exportations totalesSource : Centre du Commerce International – Nations Unies. Ces statistiques incluent les exportations de pétrole.(on peut estimer dans ces conditions que les exportations vers l’Iran représenteraient seulement près de 6 % des exportations non pétrolières des EAU). Pour le Qatar, le commerce extérieur avec l’Iran est également de peu d’importance puisque ses exportations vers l’Iran ne représentaient que 0,9 % de ses exportations et ses importations d’Iran, 0,9 % de ses importations en 2017.Source : Centre du Commerce International – Nations Unies.Les principaux produits importés de l’Iran par les EAU sont des combustibles minéraux, de la fonte et de l’acier et des fruits. Les principaux produits exportés par les EAU vers l’Iran sont les voitures, les appareils mécaniques, les appareils électriques, les perles et métaux précieux.Source : Centre du Commerce International – Nations Unies.Les principaux produits importés de l’Iran par le Qatar sont les combustibles minéraux, le plâtre et le ciment, les légumes. Les principaux produits exportés par le Qatar vers l’Iran sont les produits pharmaceutiques et les voitures.Source : Centre du Commerce International – Nations Unies.

Ce poids important des EAU dans le commerce extérieur iranien s’explique avant tout par le positionnement stratégique des EAU, et notamment de l’émirat de Dubaï, en tant que cluster commercial dans le Golfe Persique. Du fait de son positionnement géographique, d’infrastructures de transport de qualité (avec notamment le port de Jebel Ali à Dubaï) et d’incitations fiscales (absence de fiscalité directe pour toutes les entreprises étrangères en dehors des secteurs pétrolier, bancaire et des assurances), les EAU se sont imposés comme un point de passage obligé pour les échanges commerciaux dans la région. De plus, dans le cas de l’Iran, on est face à une économie encore relativement fermée, notamment aux investissements étrangers, et qui ne fait pas partie de l’OMC. De ce fait, de nombreuses entreprises étrangères préfèrent, pour accéder au marché iranien, exporter d’abord aux EAU. Par la suite, les marchandises sont réexportées en Iran. De même, du côté iranien, il est souvent plus facile d’exporter d’abord aux EAU. Par la suite, les biens sont réexportés vers une autre destination. On peut noter que parallèlement au commerce officiel entre les EAU et l’Iran, il existe d’importants flux de contrebande : les importations illégales en provenance de Dubaï ont été estimées en Iran à près de 40 % des importations officielles.« Chaque année, les importations illégales de Chine et des EAU représentent 15 milliards de dollars », Mashregh News, 27 septembre 2016. Ces statistiques portent sur les années 2013-2014. À l’époque, les EAU appliquaient les sanctions contre l’Iran avec sévérité. On peut donc penser que ce rapport de 40 % entre les importations illégales et officielles pourrait être encore d’actualité aujourd’hui.Ces liens commerciaux entre l’Iran et les EAU ont naturellement conduit de nombreux commerçants et entreprises iraniens à s’installer à Dubaï. On estime qu’il y a près de 500 000 Iraniens qui vivent aujourd’hui aux EAU, principalement à Dubaï, ce qui représente près de 5 % de la population.Ghasemilee, S., « UAE soldiers to learn Persian », News essential, 11 avril 2011.En 2010, on estimait qu’il y avait près de 8 000 entreprises iraniennes installées à Dubaï.Reuters, « Dubaï traders fear sanctions impact on Iran business », 30 novembre 2011.De nombreux Iraniens ont pris l’habitude de faire des séjours touristiques à Dubaï (près de 400 000 en 2017). On constate toutefois un recul des visiteurs venus d’Iran depuis 2016 du fait des difficultés économiques croissantes en Iran.

Tableau 1 : Classement des partenaires commerciaux périphériques de l’Iran durant le premier semestre de 2018Ces résultats ne portent que sur le commerce avec les pays considérés comme proches de l’Iran. Ainsi, l’Irak est le 2ème marché de l’Iran à l’export, derrière la Chine, qui n’apparaît pas dans ce classement.

  • Classement des pays en tant que marché à l’exportation
  • Classement des pays par rapport à leur part de marché en Iran

Source : Iran Trade Promotion Organisation (ITPO)

Les échanges commerciaux entre l’Iran et les EAU : une volonté des Émirats de limiter les relations avec l’Iran

Comme cela a été dit plus haut, les EAU ont, depuis des décennies, joué un rôle central dans le commerce extérieur iranien. Toutefois, si l’on revient sur les 10 dernières années, on se rend compte que ces échanges ont été affectés par les tensions diplomatiques croissantes entre les deux pays. Les EAU ont, à partir de 2011, appliqué les sanctions des Nations unies et des États-Unis contre l’Iran prises à l’époque pour contraindre le pays à arrêter son programme d’enrichissement d’uranium. Cette stratégie était liée aux préoccupations sécuritaires que faisait peser sur les EAU la perspective d’un programme nucléaire militaire iranien. Les restrictions en matière de financement des échanges avec l’Iran décidées par la Banque Centrale des EAU ont notamment conduit à une très forte baisse des importations de l’Iran aux EAU qui ont reculé de 17,4 milliards de dollars en 2011 à 5,5 en 2016. Du côté des exportations de l’Iran vers les EAU, on note également une baisse, quoique moins prononcée, entre 2011 et 2015. Puis, suite à la levée des sanctions contre l’Iran après l’accord sur le nucléaire de Vienne en juillet 2015, les importations de l’Iran en provenance des EAU sont reparties à la hausse en 2017 avec une progression de 42 %. Les exportations de l’Iran se sont également redressées en 2016 et 2017. Mais ce rebond a été de courte durée. On constate notamment une baisse de 15 % des importations de l’Iran en provenance des EAU en 2018 par rapport à l’année précédente.

Graphique 1 – Les échanges commerciaux de biens non pétroliers entre l’Iran et les EAU (milliards de dollars)

Source : ITPO, estimation auteur pour 2018.

Il faut noter que ce récent recul des importations iraniennes en provenance des EAU s’explique en partie par la dégradation de l’environnement macroéconomique iranien en 2018 du fait essentiellement de la réimposition des sanctions américaines suite à la sortie des États-Unis de l’accord sur le nucléaire de juillet 2015. La valeur de la monnaie iranienne sur le marché parallèle s’est effondrée avec une dépréciation de près de 70 % entre septembre 2017 et début mars 2019, ce qui rend les importations plus coûteuses. En outre, selon le FMI, l’économie iranienne a enregistré un recul du PIB en 2018 (‑1,5 %). Cependant, on peut noter qu’en parallèle, les EAU ont manifestement décidé de coopérer totalement avec les États-Unis pour mettre en place une politique de « pression maximum » sur les autorités iraniennes en limitant le plus possible les échanges économiques avec l’Iran. En fait, les commerçants iraniens présents à Dubaï constatent qu’ils font face, depuis le retour des sanctions américaines, à une stratégie délibérée des EAU visant à les décourager de commercer avec l’Iran : difficultés en matière de renouvellement des permis de séjour, restrictions quant aux activités des banques iraniennes aux EAU et aux possibilités d’échanges financiers avec l’Iran, arrestation d’un réseau de personnes participant à des transferts de fonds vers les Pasdaran en Iran,Voir à ce sujet, « Dubaï : la fin des illusions pour l’Iran », Eghtesad news, 27 février 2018, « Guerre économique ouverte des Émirats Arabes Unis contre l’Iran », Tabnak, 11 mai 2018.etc. La presse iranienne évoque également le fait que l’année dernière, les EAU ont fermé près de 3 000 comptes bancaires d’entreprises et commerçants iraniens. Des entreprises qui travaillent avec les Iraniens ont vu leurs comptes bancaires fermés. Les autorités des EAU ont même mis des commerçants iraniens sur les listes des entités accusées de terrorisme. Les commerçants iraniens déclarent par ailleurs que les EAU ne les laissent même plus utiliser leurs comptes bancaires privés. Auparavant, les commerçants iraniens créaient des entreprises aux EAU en plaçant un directeur local, même ces dernières sont graduellement fermées. Au total, les entreprises iraniennes présentes aux EAU ont bien compris que sous prétexte de lutter contre le blanchiment d’argent, le gouvernement des EAU a décidé de les décourager de commercer avec l’Iran. Face à de telles difficultés, un certain nombre de commerçants iraniens ont même décidé de s’installer ailleurs et de quitter les EAU.Voir à ce sujet, « Expulsion de commerçants iraniens des Émirats Arabes Unis sous le prétexte de lutte contre le blanchiment d’argent », Moasser, 4 juillet 2018.

Les autorités iraniennes ont évidemment protesté face à ces agissements qu’elles relient aux tensions diplomatiques actuelles entre l’Iran et un front composé des EAU, de l’Arabie saoudite et d’Israël. Face à la volonté des EAU d’appliquer un embargo économique contre l’Iran, les autorités iraniennes envisagent de ne plus considérer les EAU comme le « pivot » du commerce extérieur du pays. Le Conseil suprême de sécurité nationale, l’organe à Téhéran qui s’occupe de toutes les questions sécuritaires, a décidé qu’il fallait trouver un pays pour remplacer les EAU en tant que partenaire commercial de l’Iran.« La confrontation politique avec les Émirats Arabes Unis est liée au fait que ce pays crée des difficultés pour les commerçants et agents de change iranien », Iran Students News Agency, 15 janvier 2019.La Banque Centrale d’Iran a également déclaré que, face aux difficultés posées aux banques iraniennes, elle était à la recherche d’établissements dans la région pour commercer et effectuer des transactions avec l’Iran.Voir à ce sujet, « Dubaï : la fin des illusions pour l’Iran », Eghtesad news, 27 février 2018. Les autorités de Téhéran réfléchissent donc à la possibilité de limiter le rôle central que joue Dubaï dans le commerce extérieur iranien en développant des relations commerciales avec Doha au Qatar ou les ports d’Oman.Voir à ce sujet, « Dubaï : la fin des illusions pour l’Iran », Eghtesad news, 27 février 2018.Cependant, ces projets ne semblent pas vraiment réalisables à court terme. Adnan Moussapour, le directeur de la Chambre de Commerce Iran – Qatar, a déclaré à ce propos : « Il ne faut pas couper nos relations avec les Émirats Arabes Unis qui était notre seule porte d’entrée pour le commerce extérieur pendant la période où nous supportions des sanctions ».« Qatar et Oman peuvent-ils remplacer les Émirats Arabes Unis en matière d’échanges commerciaux ? », Asrdiplomacy, 28 février 2018.Par ailleurs, le montant des échanges avec les EAU reste aujourd’hui très largement supérieur à celui enregistré avec le Qatar et il sera difficile de faire évoluer cette situation à très court terme. Dans tous les cas, ces tensions commerciales et diplomatiques de l’Iran avec les Émirats Arabes Unis ont nourri une réflexion stratégique à Téhéran qui, phénomène nouveau, tend à associer beaucoup plus clairement puissance géopolitique et pouvoir économique. Massoud Daneshmand, directeur de la Chambre de Commerce Iran – Émirats Arabes Unis, a rappelé ainsi : « En 1988, les importations et les exportations des EAU étaient respectivement de 10 et 60 milliards de dollars. Aujourd’hui, leurs importations et exportations ont atteint 300 et 350 milliards de dollars. Les EAU peuvent donc, beaucoup plus facilement qu’auparavant, négliger leurs relations économiques avec l’Iran ».Voir à ce sujet, « Expulsion de commerçants iraniens des Émirats Arabes Unis sous le prétexte de lutte contre le blanchiment d’argent », Moasser, 4 juillet 2018.

Les échanges commerciaux entre l’Iran et le Qatar : des ambitions iraniennes aujourd’hui déçues

La décision en 2017 de l’Arabie saoudite, des Émirats Arabes Unis, du Bahreïn et de l’Égypte d’établir un blocus économique contre le Qatar a fait naître beaucoup d’espoirs en Iran sur les possibilités pour les entreprises iraniennes d’accroître leurs exportations vers ce pays. En effet, d’une part, les importations du Qatar en provenance des cinq pays arabes imposant ce blocus ont représenté près de 3 milliards de dollars en 2017 (Source : CCI – NU). En outre, du fait du blocus organisé contre Doha, les seules voies d’accès terrestres à ce marché passaient par l’Iran. D’autre part, les autorités iraniennes avaient le sentiment que le contexte diplomatique était favorable puisque le soutien politique de l’Iran après la mise en place du blocus, avec notamment l’autorisation accordée aux compagnies aériennes travaillant avec le Qatar d’utiliser son espace aérien, avait été apprécié à Doha.Ahmad Ahan, haut responsable gouvernemental du Qatar, a notamment déclaré : « Face à ce blocus … Nous remercions le peuple et la République Islamique d’Iran de s’être tenus à côté de nous ». Cf. « Le développement des relations économiques entre le Qatar et l’Iran », Baeghtesad, 13 mai 2018.De plus, la possibilité de développer des relations économiques avec le Qatar pour l’Iran était vue à l’époque comme une stratégie permettant d’affaiblir le rôle central des EAU dans les relations commerciales de l’Iran avec le monde extérieur : en clair, le Qatar pouvait remplacer les EAU en tant que cluster régional pour l’Iran.« Qatar et Oman peuvent-ils remplacer les Émirats Arabes Unis en matière d’échanges commerciaux ? », Asrdiplomacy, 28 février 2018.Enfin, le développement de relations économiques avec Doha était également considéré comme un moyen de développer des relations stratégiques avec un pays arabe du Golfe Persique et « de mettre en échec la politique de diabolisation de l’Iran menée par ces pays [sous la direction de l’Arabie saoudite] ».« La part de marché de l’Iran au Qatar : faible dans le passé, face à de nombreux concurrents aujourd’hui », Islamic Republic News agency, 17 juin 2017.

Or, les évolutions des relations commerciales avec le Qatar ne semblent pas avoir répondu à ces attentes (cf. Graphique 2). On peut noter pourtant que les exportations de l’Iran vers le petit émirat ont très fortement progressé en 2017 par rapport à 2016 avec une croissance de 181 % puis se sont stabilisées en 2018.

Graphique 2 – Les échanges commerciaux de biens non pétroliers
de l’Iran avec le Qatar (millions de dollars)

Source : ITPO, estimation auteur pour 2018.

En fait, les autorités iraniennes espéraient enregistrer une croissance beaucoup plus forte de leurs exportations au Qatar, du fait du retrait des EAU, de l’Arabie saoudite et de l’Égypte de ce marché. Un certain nombre d’observateurs iraniens notent que c’est surtout la Turquie qui a profité de cet embargo.« Le marché du Qatar pour l’Iran ou la Turquie ? », Iran Student News Agency, 11 décembre 2017. Pourtant, la progression des exportations de la Turquie au Qatar en 2017 par rapport à 2016 a été, d’après le CCI-NU, moins forte que celle de l’Iran (+48 %). En fait, les décideurs iraniens pensaient que leur proximité géographique avec le Qatar jouerait plus en leur faveur dans la compétition ouverte pour accéder à ce marché.

Une réflexion s’est donc engagée en Iran pour comprendre pourquoi les exportations de l’Iran vers le Qatar n’avaient pas atteint les objectifs attendus. Parmi les contraintes qui ont freiné le développement des ventes iraniennes au Qatar, sont notamment évoquées l’impossibilité de transférer les devises obtenues en Iran car les banques iraniennes sont sous sanctions américaines.« Pourquoi n’avons-nous pas été capable de prendre possession du marché du Qatar après le blocus économique de ce pays ? », Tabnak, 30 janvier 2019.Parallèlement, certains considèrent que les entreprises iraniennes n’ont pas fait assez d’effort en matière d’emballage des produits afin de s’adapter à un marché disposant d’un très fort pouvoir d’achat.« Pourquoi n’avons-nous pas été capable de prendre possession du marché du Qatar après le blocus économique de ce pays ? », Tabnak, 30 janvier 2019.D’autre part, les dirigeants qataris notent que le marché iranien reste relativement fermé du fait de tarifs douaniers élevés, ce qui peut limiter la volonté en retour du Qatar de faciliter les exportations iraniennes.« Le développement des relations économiques entre le Qatar et l’Iran », Baeghtesad, 13 mai 2018. Enfin, Mehdi Karimi Tafaresh, Directeur du syndicat des producteurs de produits agro-alimentaires, considère que l’Iran, qui dispose d’un véritable avantage comparatif sur le marché du Qatar, du fait de la qualité de ses fruits et légumes, n’a pas pu en profiter en raison de l’absence de containers frigorifiques sur les bateaux iraniens.« On a donné la part de marché de 4,9 milliards de dollars du marché du Qatar à la Turquie », Baeghtesadi, 21 juillet 2018.Enfin, certains analystes iraniens considèrent également que, pour ne pas être accusés par l’Arabie saoudite et les EAU de devenir un véritable allié de l’Iran, le Qatar ne souhaite pas voir ses relations économiques progresser trop rapidement avec la République islamique.« La part de marché de l’Iran au Qatar : faible dans le passé, face à de nombreux concurrents aujourd’hui », Islamic Republic News agency, 17 juin 2017.À plus long terme, les autorités iraniennes continuent de penser que le potentiel de croissance des exportations iraniennes au Qatar reste élevé. On a déjà évoqué le cas des fruits et légumes. Le ministre iranien de l’Industrie, des mines et du commerce, Mohamed Shariatmadari, estime également que le secteur des matériaux de construction pourrait fortement accroître ses ventes au Qatar.« Les trois problèmes à résoudre dans le commerce avec le Qatar », Eghtesad news, 27 novembre 2017.D’ailleurs, les autorités des deux pays ont évoqué un certain nombre de projets pour renforcer les liens commerciaux entre les deux pays tels que la création d’une ligne de transport maritime commune, d’une zone industrielle commune et la mise en place d’une zone de libre-échange.« Les trois problèmes à résoudre dans le commerce avec le Qatar », Eghtesad news, 27 novembre 2017.

Conclusion

Face à la volonté des EAU d’appliquer une pression économique maximum sur leurs intérêts économiques, les autorités iraniennes peuvent mettre en place plusieurs stratégies possibles. Sortir par le haut de cette crise consisterait pour l’Iran à renforcer son intégration dans l’économie mondiale par l’intermédiaire notamment d’une adhésion à l’OMC. Dans une telle éventualité, les EAU perdraient beaucoup de leur attractivité en tant que point de passage obligé de l’Iran dans ses échanges avec le reste du monde. L’impact des sanctions économiques américaines rend cependant ce type de politique impossible à court terme. Une autre possibilité évoquée en Iran est de trouver un pays qui remplacerait les EAU en tant que pivot du commerce extérieur iranien : le Qatar pourrait potentiellement jouer ce rôle. Toutefois, le montant encore faible des échanges avec l’Iran et la volonté du Qatar de ne pas apparaître comme un nouvel allié de l’Iran, font que ce choix reste peu réaliste. Au bout du compte, la solution pour l’Iran ne passerait-elle pas par un renforcement de son intégration régionale ? L’Irak, l’Afghanistan, la Turquie, Oman et le Pakistan sont maintenant rentrés dans le classement des 10 principaux marchés à l’exportation de l’Iran pour les produits non pétroliers. Les autorités iraniennes espèrent développer leurs échanges économiques avec le Qatar donc, et la Syrie, notamment à l’occasion de la reconstruction qui s’annonce. Les décideurs iraniens se rendent compte qu’il est beaucoup plus compliqué pour les autorités américaines d’obliger tous ces pays, dont l’économie est souvent fragile et les entreprises peu dépendantes des États-Unis, à limiter leurs échanges avec Téhéran, que cela ne l’est avec l’Union européenne, le Japon ou la Corée du Sud. Finalement, comme en 2010-2012, les sanctions contre l’Iran vont peut-être conduire ce pays à renforcer ses liens commerciaux avec ses voisins.

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